Municipalismes, communalismes : retours d’expériences — 42e Hestejada de la arts – jeudi 22 août 2019

Pastille de Cécile Royer pour Uzeste Musical

Cette conférence-débat sur le thème des municipalismes et communalismes fait suite à la journée du 7 juillet dernier qui a ouvert la saison estivale d’Uzeste Musical, journée que nous avions intitulée « Uzeste, carrefour des possibles » et que nous avions sous-titrée « Communisme, commun(s), communalisme et communautés libertaires ». Nous avons souhaité prolonger cette journée à l’occasion de l’hestejada, parce qu’il nous semble que la question du politique à l’échelle des communautés de vie locales fait montre depuis quelques temps d’un dynamisme renouvelé porté par un ensemble d’intérêts assez divers : pour la démocratie participative, les communs, l’écologie sociale ou plus simplement la nécessité de mettre en pratique des formes de solidarité, d’émancipation et d’autogouvernement. Or il se trouve que ces pratiques « à bas bruit » qui tentent de redéfinir des manières de faire communauté se déploient généralement à des échelles locales modestes et plus particulièrement à l’échelle municipale ou communale sur la base d’un travail de production de la démocratie et d’institution d’un commun par le bas.

La chose n’est évidemment pas complètement nouvelle, on peut penser à la Commune de Paris ; à des expériences plus contemporaines conduites dans des situations de guerre de haute ou de basse intensité : les villages zapatistes au Chiapas, les communes du Rojava au Kurdistan syrien ; mais on peut également se référer à certaines expérimentations en temps de paix : fut un temps, Porto Alegre au Brésil ; Ovacik en Turquie ; Jackson aux États-Unis (Mississipi) ; Marinaleda et certaines villes en Espagne suite au mouvement des Indignés et, plus près de nous, en France :  Masquières, Saillans, Saint-Claude, Trémargat, ZAD Notre-Dame-des-Landes, etc.

Donc ce à quoi nous assistons en certains endroits tout au moins, c’est à une tentative de reprise en main du politique au plus bas de l’échelle étatique, le plus souvent dans le cadre de municipalités – mais parfois aussi contre l’État et ses institutions. L’échelle locale peut aussi être celle d’un canton, d’un quartier, d’une rue, d’un rond-point, d’un lieu particulier, souvent culturel. Pensons par exemple aux camarades de l’Asilo à Naples qui ont réussi à produire et à imposer à la métropole italienne de nouvelles normes juridiques quant à l’usage civique et collectif de certains lieux, normes juridiques qui sortent ces lieux à la fois des formes de gestion municipale  et privée. 

Sans majorer la portée générale de telles initiatives, il ne faut pas pour autant en minorer la portée politique locale.Ces initiatives sont de véritables ferments pour repenser les pouvoirs locaux, leur articulation-fédération à un autre niveau d’échelle et pour mettre en œuvre des espaces oppositionnels plus conséquents. Il s’agit de redonner aux citoyens le moyen de travailler à augmenter concrètement, d’une manière ou d’une autre, leur puissance de penser et d’agir en commun, par exemple quant aux questions de l’alimentation, de l’énergie, du logement, de l’éducation, de la relocalisation de l’économie, de l’accueil des migrants, mais aussi du travail, de la communalisation des moyens de production et des institutions municipales, et ce, dans un cadre hostile où se déploient des logiques prédatrices de centralisation des pouvoirs décisionnaires, de métropolisation, de technocratisation et de marchandisation des territoires de vie qui vont bien évidemment à l’encontre d’un empowermentà la base.

Donc l’idée de cette conférence-débat est de vous donner l’occasion de prendre connaissance de certaines de ces expérimentations pratiques de municipalisme-communalisme, aussi de certaines de leurs théorisations et bien sûr de discuter ensemble de ces tentatives d’autogouvernement, de production de commun et d’institution politique de communautés locales mobilisées. Pour ce faire, j’ai pensé qu’il serait judicieux de commencer par donner la parole à des acteurs de terrain. J’ai plus particulièrement pensé à  Christophe Joneau, directeur de la Fraternelle de Saint-Claude, à Floréal Roméro, paysan, chercheur indépendant et passeur, notamment en France, des théories du municipalisme libertaire de Murray Bookchin, et enfin à Éric Bréhin, ancien maire et conseiller municipal de la commune bretonne de Trémargat.

Christophe Joneau, Éric Bréhin et Floréal Roméro